Traitement de l’incontinence anale

Traitement de l’incontinence anale

La première approche thérapeutique surtout lorsque les épisodes d’incontinence sont rares et peu conséquents doit être médicale. Il convient donc notamment d’éviter les épisodes de selles liquides. C’est devant un déficit de contraction volontaire du sphincter strié que la rééducation périnéale peut constituer une aide à une telle approche conservatrice. La réparation d’un appareil sphinctérien rompu au cours d’un accouchement est aussi susceptible de donner une amélioration nette dans 80% des cas. Le rétablissement d’une continence au gaz est plus aléatoire et les patients doivent en être prévenus.

Lorsque l’appareil sphinctérien est trop altéré pour être réparé, des solutions de remplacement peuvent être envisagées : la graciloplastie dynamisée et le sphincter artificiel. La graciloplastie dynamisée consiste en la transposition d’un muscle adducteur de la cuisse, le droit interne, autour de l’anus puis de le stimuler par un pace maker ce qui le transforme d’un muscle strié fatigable en un muscle lisse avec tonus permanent. La deuxième technique de remplacement sphinctérien est la mise en péri-anal d’un sphincter artificiel. Ce matériel prothétique, placé autour de l’anus, peut être gonflé et dégonflé à volonté pour permettre la défécation. Ces deux techniques sont généralement réservées à des patients présentant des incontinences sévères n’ayant d’autre alternative que la colostomie définitive et surtout lorsque l’appareil sphinctérien n’est plus anatomiquement intact. Ces deux techniques sont des gestes relativement lourds avec une morbidité importantes avec risque de réintervention et finalement, l’utilisation du procédé n’est possible que dans seulement 60% des cas. Elles sont d’indications actuellement plus ciblées, notamment depuis le recours à la neuromodulation d’une racine sacrée.

Depuis quelques années, les chirurgiens urologues ont développé une procédure de prise en charge de l’incontinence urinaire et des vessies instables. Elle consiste en une stimulation électrique permanente d’une racine sacrée S3. Les premiers travaux chez des incontinents urinaires ont montré que ceux présentant une double incontinence, à la fois urinaire et fécale, constataient aussi une amélioration de l’incontinence fécale. Cette technique est maintenant utilisée dans l’incontinence fécale isolée. Le mécanisme exact d’action de cette neuro-modulation n’est pas parfaitement connu. Toutefois, il a été observé dans de nombreuses séries une amélioration nette de la symptomatologie avec un retour à une vie sociale acceptable. D’après les premiers travaux réalisés, il apparaît que cette thérapeutique est particulièrement indiquée chez les patients présentant une incontinence fécale, avec un sphincter anatomiquement respecté dont l’innervation motrice peut être altérée par une neuropathie pudentale. En général, la symptomatologie chez ces femmes est dominée par une impériosité des exonérations avec l’impossibilité de retenir les selles plus d’une minute. Une telle symptomatologie est très désocialisante, tout transport en commun ou déplacement prolongé étant angoissant. La neuro-modulation sacrée dans ces cas particuliers améliore considérablement la symptomatologie d’une majorité de patientes en permettant d’augmenter de façon importante et significative le temps de retenu des selles.  Cette technique est d’autant plus intéressante, qu’elle débute par une phase test avant implantation sous cutanée du neuromodulateur. Ce test consiste en la mise en place d’une électrode de neuro-modulation par voie per-cutanée sous anesthésie locale. S’ensuit une période de 10 jours au cours de laquelle l’électrode reliée à un boîtier de stimulation externe permet de tester cette thérapeutique. L’évaluation des résultats à l’aide de critères objectifs (nombre de selles, durée des impériosités, nombre d’accidents d’incontinence) et plus subjectifs (confort, vie socialle) permet de prendre une décision. Dans près de deux tiers des cas, il est noté une nette amélioration par rapport au même relevé fait antérieurement avec un regain d’autonomie. Dans ces cas, la mise en place d’un neuro-modulateur sous-cutané est proposée. Cette mise en place se fait, elle-aussi, sous anesthésie locale par une petite incision de la fesse. L’électrode ayant servie pour le test étant alors connecté à un boîtier qui sera placé sur l’aponévrose du grand fessier généralement dans le cadran supéro-externe de la fesse homo-latérale au trou sacré choisi. L’avantage indiscutable de cette technique par rapport au sphincter artificiel et à la graciloplastie dynamisée est sa faible morbidité et l’absence d’intervention directe du patient dans le fonctionnement.

Lorsque le test de neuro-modulation n’a pas été efficace, d’autres thérapeutiques en cours d’évaluation peuvent être envisagées. Sont en évaluation ; le renforcement du tonus de base du sphincter interne notamment dans les incontinence au gaz et les incontinences nocturnes par l’application de radiofréquence ou l’injection de gel, techniques identiques à celles développées pour le traitement du reflux gastro-œsophagien. Lorsque les moyens de remplacement ou de renforcement sphinctérien sont un échec ou non indiqués, il reste l’intervention de Malone. L’objectif de ce procédé est la création d’un conduit permettant la réalisation de lavements coliques antérogrades. L’incontinence fécale est invalidante car elle ruine la propreté intime des patients. Tenter d’éviter ces accidents par des lavements transanaux est le plus souvent un échec et le plus souvent ils sont rapidement abandonnés. En revanche, la réalisation d’une évacuation descendante du colon qui se fait en une trentaine de minutes et assure une propreté périnéale pour 48 heures est dans la très grande majorité des cas acceptée et réalisée efficacement, ce d’autant que la stomie créée pour l’accès à l’intestin n’est pas productive. Cette solution est bien adaptée aux incontinences passives et aux incontinences actives n’ayant pas pu être corrigées par les autres procédés thérapeutiques.

Le recours à une colostomie excluant le passage transanal des selles constitue la solution ultime qui doit rester l’exception.