Splénopancréatectomie gauche pour cancer

Splénopancréatectomie gauche pour cancer

Les pancréatectomies gauches pour adénocarcinome (ADK) du pancréas représentent 15 à 30% des pancréatectomies gauches. Le cancer du pancréas gauche, tardivement symptomatique, est souvent diagnostiqué à un stade avancé ne relevant plus d’un traitement chirurgical. Ainsi, la résécabilité des cancers du pancréas gauche dans les séries chirurgicales, varie de 9 à 20%. Le rapport de l’AFC de 1994 sur les cancers du pancréas, qui rapportait 3747 cancers du pancréas, comptait 590 cancers du pancréas gauche dont 16% seulement étaient réséqués sans métastase extra pancréatique décelable. La mortalité opératoire était de 9%, la survie de 3% à 3 ans et nulle à 4 ans… En 1990 une revue de la littérature ne colligeait que 5 patients vivants à 5 ans rapportés. Ces mêmes résultats décevants ont été rapportés simultanément par une série multi-centrique américaine (<30 patients réséqués) montrant une mortalité opératoire prohibitive (21%), remettant en cause pour certains l’utilité de la résection des cancers du pancréas gauche N+ ou de plus de 3 ou 4 cm.
Mais d’autres centres nord-américains ou asiatiques, plus spécialisés et chirurgicalement agressifs, ont rapporté à la même époque de courtes séries mono-centriques de patients plus récemment opérés et avec une mortalité opératoire <3% ou nulle malgré une chirurgie plus étendue ou des tumeurs souvent > 4cm. Ces équipes ont noté depuis plusieurs survivants à 5 ans avec des survies actuarielles de 9 à 29% à 5 ans, comparables à celles des duodéno-pancréatectomie céphalique pour ADK. Des survivants à 10 ans ont été rapportés ultérieurement, même chez des patients N+, justifiant aujourd’hui ces interventions carcinologiques. La coelioscopie diagnostique dans le bilan d’extension des cancers du pancréas a été largement étudiée. Alors que son rôle a été initialement surévalué pour les ADK céphaliques aujourd’hui bien explorés par les scanners multi-barettes, la coelioscopie diagnostique trouve encore sa place pour les ADK du pancréas gauche qui s’accompagnent plus souvent d’une carcinose ou de métastases hépatiques sous-capsulaires de petite taille, du fait de lésions primitives déjà souvent volumineuses. L’équipe de Boston rapporte ainsi pour les seuls ADK gauches jugés résécables au scanner la découverte par la coelioscopie première de métastases hépatiques ou péritonéales méconnues chez 36 % des patients. L’ajout d’une étude cytologique péritonéale augmentait encore le nombre des patients dont la résection était contre indiquée par la coelioscopie. L’écholaparoscopie en revanche n’a pas d’utilité clairement démontrée. La réalisation de la coelioscopie exploratoire ne semble pas avoir d’influence péjorative sur l’évolution ultérieure carcinologique des patients. Cet examen comportant une ouverture de l’arrière cavité des épiploons est pour nous, comme pour d’autres, systématique pour toute tumeur suspecte d’ADK corporéo-caudal de plus de 3 cm ou de suspicion clinique ou radiologique de carcinose.

La technique chirurgicale d’une spléno-pancréatectomie gauche pour ADK est aujourd’hui mieux standardisée. La pancréatectomie est au mieux réalisée de droite à gauche permettant une ligature première des vaisseaux spléniques et l’examen extemporané de la tranche de pancréatectomie, dont l’utilité est discutée car la totalisation de la pancréatectomie semble rarement bénéfique en cas d’ADK. Elle comporte un curage de la faux de l’artère hépatique commune, du bord gauche du tronc coeliaque et de l’origine de l’artère mésentérique supérieure (GG N1). Un curage plus étendu (à droite du TC et inter aortico-cave GG N2 n’a pas d’utilité démontrée. La résection emporte, pour certains auteurs asiatiques, systématiquement le fascia pré rénal gauche et la surrénale gauche. Les vaisseaux courts sont sectionnés au ras de l’estomac et la rate emportée en monobloc avec le pancréas.

L’élargissement nécessaire dans 20 à 39% des cas, au confluent veineux spléno-mésentérico-porte ou aux organes de voisinage (colon, estomac, surrénale et rein G), majore les transfusions et la morbidité post-opératoire mais donne des résultats identiques aux résections standard quand l’exérèse est jugée complète R0. La profondeur de l’atteinte veineuse à un rôle pronostique. Les interventions d’Appleby modifiées pour ADK réséquant un tronc coeliaque envahi n’ont en revanche pas d’utilité clairement démontrée à ce jour sur la survie des patients. La morbidité post-opératoire reste dominée par la fistule pancréatique dont le seul facteur de risque clairement démontré sur ces pancréas sains est l’obésité. Son incidence varie de 10 à 40% en fonction des séries et des définitions retenues. Aucun mode technique de fermeture de la tranche pancréatique n’a clairement démontré sa supériorité. Les analogues de la somatostatine ne semblent pas significativement en diminuer le risque. La place de la résection coelioscopique reste encore modeste pour ces interventions carcinologiques parfois complexes et étendues.

Les facteurs pronostics les plus fréquemment retrouvés sont le statut ganglionnaire, la taille, la différentiation tumorale et le caractère R1 de l’exérèse (rôle de la marge rétro-péritonéale). Le traitement adjuvant standard à toute résection de cancer pancréatique est basé sur la Gemcitabine. La place de la radiothérapie reste encore discutée.